En 1974, Yvon Rivard est un jeune professeur qui n’a pas encore publié, alors que Pierre Vadeboncoeur est un essayiste consacré sur le point de prendre sa retraite. Les deux hommes entreprennent à ce moment-là une correspondance qui ne se concluera qu’avec la mort de Vadeboncœur, en 2010.

Une amitié libre permet de découvrir ce qui a d’abord réuni ces deux intellectuels, de même que l’étroite relation qui se tissera entre eux, où deux écrivains se donnent la parole, sont attentifs l’un à l’autre. La hauteur du style de cet échange est rien de moins qu’extraordinaire.

 PRÉSENTATION

L’essayiste contemporain Mathieu Bélisle signe la préface de ce livre et en dit ceci : « On ne peut s’empêcher de remarquer à quel point chacun a exercé une influence sur l’autre, s’est laissé bouleverser, émouvoir, déranger par l’autre, au risque de l’effronterie ou de l’inconvenance. […] C’est cette sincérité de ton, cette franchise dans le propos qui rendent cette correspondance admirable et nécessaire : la vérité partagée n’est pas une chose à redouter, encore moins à cacher ou à taire, mais le bien le plus précieux, la marque de l’authenticité, cela même qui rend libre. »

L’ouvrage comporte également une postface d’Yvon Rivard.


EXTRAIT

D’où me vient cette sécheresse, cette façon d’aborder les êtres et les choses, comme s’ils n’existaient pas en dehors de la vision que j’en ai ? Je ne sais pas, j’attends que la grâce me soit donnée, que l’eau me fasse une peau moins sèche. Je n’aurais pas été surpris ni froissé de recevoir, au lieu de votre lettre, un petit carton portant l’inscription : « Veuillez vous essuyer les pieds. »
Yvon Rivard, 6 mars 1975

Je vous sens dans cet état de recherche obscure. Mais vous me médusez, car vous me semblez anxieux et vous me paraissez rompre abruptement, d’un jour à l’autre, avec les voies où vous vous avancez, comme par l’effet de je ne sais quelle vive impatience ou comme par jugement critique sans cesse à l’affût et prononçant à tout moment des arrêts ! Je ne sais trop, car je ne vous connais pas, et c’est une simple impression de ma part. Je ne voudrais d’ailleurs pour rien au monde vous inviter à abandonner cette attitude, car les voies du dieu sont insondables, et l’esprit critique, même extrême, peut fort bien, par une succession de refus, de marche en marche, conduire à quelque chose qui autrement serait inaccessible. Je ne sais. C’est un des possibles. Toute la question est de savoir : est-ce le bon ?
Pierre Vadeboncœur, 7 avril 1975

Au fond, tu as bien raison : personne ne peut convaincre personne d’être ou non dans la bonne voie. Mais lorsque deux étrangers se rencontrent, ils peuvent mesurer dans le regard de l’autre la distance qui les sépare encore d’eux-mêmes. Cette voie qu’ouvre l’amitié, n’est-ce pas le reflet même des mots qui détruit toute certitude et relance le mouvement, ébranle la main ?
Yvon Rivard, 13 juillet 1976
— Une amitié libre, Yvon Rivard et Pierre Vadeboncœur

PRESSE

Malgré les différences de leurs idéalismes, Rivard et Vadeboncœur se rejoignent dans leur goût de l’ailleurs, qui résume leur attachement au Québec par un mot: ambiguïté.

— Michel Lapierre, Le Devoir

Malgré les différences de leurs idéalismes, Rivard et Vadeboncœur se rejoignent dans leur goût de l’ailleurs, qui résume leur attachement au Québec par un mot: ambiguïté.

— Sarah-Louise Pelletier-Morin, Lettres québécoises

Entrevue d’Yvon Rivard avec Marie-Andrée Lamontagne.

Parking nomade

YVON RIVARD

Né en 1945, Yvon Rivard a enseigné la littérature à l’Université McGill jusqu’en 2008. Son œuvre d’écrivain lui a valu de remporter à deux reprises un Prix littéraire du Gouverneur général du Canada et le Grand Prix du livre de Montréal.

Photo : Dominique T. Skoltz.

PIERRE VADEBONCŒUR

Pierre Vadeboncœur (1920-2010), après des études en droit à l’Université de Montréal, a travaillé à la CSN jusqu’en 1975. Il a collaboré à plusieurs revues, dont Cité libre et Liberté, et publié près d’une trentaine d’essais.

Photo : Jean-Yves Roy.

Correspondance / Collection « L’écritoire » / Prix indicatif : 24,95 $

192 pages environ / 12,5 x 20,3 cm / 978-2-7609-6080-0

En librairie le 19 octobre 2022

Également disponible au format numérique - ePub