« On ne peut pas reculer devant le savoir. Le désir de connaître est aussi fort que tout autre désir. Papa, à l’époque, en manipulant des substances ayant la force de tuer en masse, aura donc fait un pari sur un fragile mais possible équilibre entre l’instinct animal et la conscience. Il a perdu son pari. »

Avec cette manière si personnelle d’évoquer des destins en faisant dialoguer les vivants et les morts, Ying Chen raconte ici merveilleusement la vie d’une illustre femme de science par la voix de sa fille, devenue à dix-huit ans son assistante sur les champs de bataille et, par la suite, dans son laboratoire. Comment ne pas penser à Marie Curie et à sa fille Irène dans cette remémoration d’outre-tombe qui fait revivre la destinée de ces deux scientifiques ainsi que d’autres membres tout aussi illustres de cette famille, leurs aléas dans l’histoire et aussi leurs combats ?

 

 EXTRAIT

Enfin, j’arrive de ce côté du monde, de l’océan, plus loin que j’aurais pu imaginer, que j’aurais voulu, et sans savoir comment.
Ici, le monde s’achève au soleil levant.
Ou, tout au contraire, le monde naît quand le soleil tombe.
D’habitude, de mon vivant, j’avais horreur de me déplacer, non pas parce
que j’étais mentalement fermée, indifférente aux autres peuples, aux endroits inconnus, mais parce que je croyais, sans bouger, tout en restant chez moi, pouvoir trouver déjà un peu de l’essentiel de cette vie sur le petit terrain qui m’était familier, dans ma ville natale, à l’intérieur de mon laboratoire, déjà connaître toutes les beautés et toutes les laideurs, toutes les sympathies et toutes les animosités, tous les éloges et tous les mépris, et en creusant sous mes pieds, déjà y obtenir des matériaux nécessaires pour en étudier les propriétés et les lois applicables universellement.
Quel gaspillage de temps et d’énergie, ces voyages. Quel vacarme, ces avions. Quelle agitation et distraction. Quelle vanité. Quelle résignation à des sollicitudes passagères et utilitaires provenant de la surface du monde. Quel éloignement de mes substances vraies, de ma raison d’être, de ma tranquillité qui seule permettrait à mon esprit de s’animer, depuis mon obscur laboratoire où parfois je croyais parvenir à briller. À briller de ces éclats rares dans une existence courte, toujours entravée, encombrée, limitée, dont je tentais de saisir ne serait-ce que la moindre lueur, le moindre reflet, fussent-ils trompeurs, afin de pouvoir me dire que ma vie a valu la peine.
J’en ai fait beaucoup, des voyages, pour en connaître la futilité.

Auparavant, le projet d’un déplacement jusqu’à ce continent, à l’heure matinale où le soleil perce par endroits le brouillard, je l’avais repoussé. L’idée même d’un voyage pour cette destination m’avait causé de la gêne.
J’avais pensé à cet endroit comme à une gigantesque plaie que j’avais l’impression de porter en moi-même, mais que je n’aimerais pas voir.
— Rayonnements, Ying Chen
 

PRESSE


On retrouve dans ce livre l’écriture tout en douceur de cette autrice appréciée pour ses romans courts et percutants. Cette fois-ci, elle réussit l’improbable pari de relater la vie de Marie Curie et de sa fille Irène, qui fut son assistante de laboratoire, et ce, sans jamais les nommer, en esquissant brillamment leurs destins, leurs luttes. Un roman du soir, qui se déguste une page à la fois.

— Julie Roy, L’actualité


[Ying Chen] aborde de façon sensible et tout en retenue la vie de Marie Curie et de sa fille Irène, qui l’assista dans les champs de bataille puis dans son laboratoire.

— Iris Gagnon-Paradis, La Presse


Plutôt que de mettre en lumière le couple Pierre et Marie Curie, c’est à un autre duo exceptionnel que s’intéresse Ying Chen : celui que formaient Marie Curie et sa fille Irène, elle aussi scientifique. Mais comme dans Blessures, son précédent roman épousant la trajectoire du médecin Norman Bethune, l’écrivaine se tient judicieusement à distance du ton du roman historique pour mieux fouiller la vie intérieure de ses personnages empruntés à la grande histoire.

— Dominic Tardif, Le Devoir


Une œuvre tout à fait unique dans le paysage littéraire canadien.

— Mireille Langlois, Radio-Canada


Ying Chen possède une plume tout en douceur, évoque avec finesse l’intériorité d’un personnage qui a fait de la science […]. Parfois déroutant, avec son action et ses personnages éthérés, et reprenant de façon circulaire les mêmes motifs, autour desquels la narratrice tourbillonne, semblant chercher une forme de paix intérieure, ce court récit très introspectif offre surtout une suite de réflexions sur ce qui nous rend humains et ce que nous léguons, sur ce que signifient la patrie et la famille, et les écueils que nous affrontons mais qui finissent, indubitablement, par changer la matière dont nous sommes faits.

★★★

— Iris Gagnon-Paradis, La Presse


C’est un très court roman, voire une plaquette. Mais ce qui compte n’est pas autant le contenant que le contenu. Et il est riche en humanité, ce texte qui narre les souvenirs d’une fille laborantine assistante de sa mère, une scientifique aujourd’hui décédée. […] Ce roman est un tribut à la féminité.

— Culturehebdo.com


Ying Chen n’est ni une écrivaine traditionnelle ni une auteure de textes réalistes. Rayonnements, son quatorzième livre, s’inscrit dans cette lignée des romans intérieurs dont l’éternel thème de la quête de soi est porté par des personnages historiques et fantomatiques.

— Sarah-Émilie Nault, Le Journal de Montréal


Grâce à la finesse de sa plume, Ying Chen met en valeur le tragique et le grandiose de la vie de ces deux femmes qui ont marqué notre histoire collective.

— Nathalie Slupik, Bible urbaine


Les personnages imaginés par l’autrice semblent aussi grands que ceux qui ont l’inspirée.

— Jean-François Crépeau, Le Canada français


Ce réquisitoire pour la beauté du monde présenté sous une forme romanesque étonne.

— France Boisvert, Culture à la carte / Radio VM


Quatorzième livre de Ying Chen, Rayonnements, avec ses grandes qualités oniriques, illustre l’audace et la maturité littéraire de celle qui a su nous éblouir avec le déchirant L’ingratitude, immense roman lauréat du prix Québec-Paris en 1995 ainsi que du Prix des libraires du Québec en 1996.

— Collections


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YING CHEN

Née en Chine en 1961, diplômée de l’Université Fudan (Shanghai) et de l’Université McGill, Ying Chen a publié une quinzaine de romans, parmi lesquels L’ingratitude (couronné par cinq prix littéraires), ainsi que deux essais.

Photo : Sion Assouline.

Roman / Collection « Nomades » / Prix indicatif : 10,95 $

112 pages environ / 11 x 17,6 cm / ISBN : 978-2-7609-3711-6

En librairie le 27 septembre 2023

Également disponible au format numérique - ePub