“Sitôt mon déjeuner avalé, je mets un peu de nourriture au fond d’un sac en plastique. Je jette un coup d’oeil par la fenêtre qui donne sur la cour arrière. Ma mère s’adresse à son chum et je peux deviner ses paroles, juste à la regarder : Honnn ! C’est-tu beau ! Ça sent-tu bon ! C’est-tu pas merveilleux ! Un p’tit jardin. Des poules. Et là, ça se regarde avec les yeux dans la graisse de bines, ça s’enlace, ça s’embrasse pis on se doute comment ça va finir.
Tout allait si bien, avant qu’elle tombe en amour. J’avais ma mère pour moi tout seul. Quand j’étais enfant, elle me traînait partout. Je pense qu’elle m’a jamais fait garder en dehors de ses heures de travail. Elle me préparait mes bouffes préférées, on jouait à des jeux ensemble, et la nuit, quand je faisais des cauchemars, j’allais me glisser dans son lit, me coller contre elle.
Depuis qu’elle a rencontré Julien, tout a changé. C’est vrai que j’ai pas été très présent pour elle cette année, mais c’était pas une raison pour me jouer un tour pareil ! Tomber en amour, c’est une chose. Obliger son fils de quinze ans à aller vivre dans un trou, loin de la civilisation, c’en est une autre.”