Depuis la forêt enchantée de son enfance, habitée par la sorcière Murasaki et gardée par une divinité kami, en passant par l’Académie où il apprend le métier des armes, à travers les deuils, les trahisons et les déceptions amoureuses, jusqu’aux joutes littéraires dans lesquelles il concourt, Matsuo apprend à vivre et à combattre en rédigeant des wakas. Ces poèmes traditionnels japonais – composés de trois vers de cinq syllabes et de deux de sept –, auxquels l’a initié sa mère dès le plus jeune âge, constituent le trait d’union, le langage commun l’unissant au monde et aux êtres.

 PRÉSENTATION

Dans ce roman qui coule comme une eau vive, où se chevauchent les genres fantastique et historique, Denis Thériault réussit à mener de front un récit palpitant et une versification originale, déployant un univers aussi riche qu’inventif.


EXTRAIT

Les incendies étaient fréquents dans les anciennes cités japonaises construites en bois, mais jamais on n’avait entendu parler d’aucun qui se comparât en magnitude à celui qui ravagea Kyoto pendant la troisième année de l’ère Angen. Débutant en pleine nuit, et gagnant rapidement en ampleur, cet incendie monstrueux fut poussé en direction nord-ouest par des vents qui soufflaient en tempête et généraient d’immenses tornades de feu. Il fit rage pendant trois jours, rasant le tiers de la ville, et la laissant en proie au pillage, à l’anarchie. Des milliers de citadins périrent. Les nobles et dignitaires de la Cour ne furent pas épargnés; nombre de demeures parmi les plus somptueuses furent réduites en cendres, et l’Empereur lui-même dut se réfugier dans une résidence secondaire tandis que les flammes dévoraient son palais.
Les jours suivants, alors qu’on dénombrait les morts, diverses hypothèses furent émises quant à la cause de cette catastrophe. Certains y virent l’intervention d’un démon tandis que d’autres l’attribuaient à un alignement astronomique néfaste, et que d’autres encore le considéraient comme une punition divine sanctionnant la détérioration morale du peuple japonais. La vérité, il n’y avait qu’une seule personne qui la connût. Cette personne savait que ni les dieux, les démons ou les astres n’avaient déclenché l’incendie, et ce avec une absolue certitude puisque c’était elle-même qui l’avait initié.
L’incendiaire… Pendant deux jours, il avait observé l’irrésistible expansion du brasier depuis les hauteurs du mont Hiei. Perché tel un corbeau sur une corniche surplombant Kyoto, il avait regardé le feu ronger inexorablement la cité impériale, la chapeautant d’un panache de fumée qui intimidait le soleil et plongeait la vallée tout entière dans une pénombre crépusculaire. Quant aux pensées qui s’agitaient dans le tréfonds de son âme, nul n’aurait pu les appréhender. Pourquoi avait-il commis cet acte inqualifiable? Qu’est-ce qui l’avait mû? À ces questions, même le plus subtil des sages n’aurait su répondre, à moins de disposer du pouvoir de reculer dans le temps, et d’en remonter le cours de sept années…
— Le samouraï à l'œillet rouge, Denis Thériault

DENIS THÉRIAULT

Après une entrée remarquée en littérature avec L’iguane (prix France-Québec, prix Anne-Hébert, prix Odyssée, gagnant du Combat des livres de Radio-Canada, prix Hervé-Foulon), Denis Thériault a connu le succès avec Le facteur émotif (prix Canada-Japon) et, plus récemment, La fiancée du facteur. Traduite en une vingtaine de langues, populaire en Angleterre et en Allemagne, son oeuvre est en voie d’être adaptée au cinéma et à la télévision.

Photo : Catherine Marchand.

Roman / Prix indicatif : 28,95 $

352 pages environ / 14 x 21,6 cm / 978-2-7609-4868-6

En librairie le 20 avril 2022

Également disponible au format numérique - ePub