“J’ai longtemps eu le luxe de vivre dans une insouciance confortable, convaincue que cela n’arrivait qu’aux voisins. Jusqu’au jour où un cas de censure survenu sur mon campus a relocalisé chez nous la réflexion et le débat liés à la liberté universitaire. Si j’ai tenu à revenir sur cette histoire, c’est moins pour faire le procès de mon université que pour autopsier un cas et le réinsérer dans une série dont il reste encore à décrire et à évaluer les causes et la portée. À côté des réflexions de plus en plus nombreuses qui tentent d’évaluer la part de responsabilité qui revient à l’idéologie, j’ai voulu creuser d’autres facteurs et réfléchir aux conséquences que peut avoir sur l’enseignement, qui est après tout un exercice collectif, la prise en compte des demandes de plus en plus nombreuses liées aux sensibilités individuelles. Je me suis donné comme point d’ancrage la discipline que je connais le mieux : la littérature et son enseignement. Le sujet n’est certes pas sans pièges, et le terrain du débat est pour ainsi dire miné par des années de clivage. Je reste néanmoins convaincue qu’il existe une voie médiane, un juste milieu, entre la nostalgie réactionnaire et l’aveuglement volontaire. Tout n’est pas au mieux, soit. Mais tout n’est peut-être pas perdu.”