Livret original commandé par l’Opéra de Montréal, La beauté du monde raconte le sauvetage des œuvres des musées du Louvre et Jeu de paume pendant la Deuxième Guerre mondiale. Objets de convoitise et de tractations douteuses, des centaines de toiles de Matisse, de Picasso, mais aussi de Vermeer, de Rembrandt, de Vinci sont sous nos yeux sauvées de justesse avant l’arrivée des Allemands dans Paris, tandis que d’autres sont carrément envoyées au Führer et à ses sbires. Parmi ceux-ci se trouve le célèbre Hermann Göring, maréchal de l’Empire allemand, qui sélectionne des milliers d’œuvres pour sa collection personnelle alors que l’art nouveau, qualifié de dégénéré, est brûlé sous les yeux de conservateurs chagrinés. À la fin de la guerre, grâce à Jacques Jaujard, directeur du Louvre et des musées nationaux, ces pièces volées ont retrouvé leur place dans leurs musées, et plus de soixante mille trésors artistiques spoliés en majorité aux Juifs ont été rendus à leur propriétaire.

 PRÉSENTATION

À partir de ces faits historiques, Michel Marc Bouchard interroge la place unique et salvatrice de l’art dans l’équilibre du monde et des cultures, à travers des enjeux de guerre et d’idéologies meurtrières.

Créé par l’Opéra de Montréal en mai 2016 à partir de la pièce éponyme de Michel Marc Bouchard, Les Feluettes raconte comment un groupe d’ex-prisonniers séquestre en 1952 l’évêque Jean Bilodeau pour lui jouer des événements ayant eu lieu quarante ans auparavant, alors que Simon et Bilodeau étudiaient au Collège Saint-Sébastien de Roberval. Simon était amoureux du jeune comte Vallier de Tilly, aristocrate français ruiné, exilé avec sa mère devenue folle à force d’attendre le retour de son mari et la chute de la IIIe République. Le spectacle des ex-prisonniers, qui évoque les amours troublées entre Vallier et Simon ainsi que les tentatives de Bilodeau de s’immiscer entre eux, a pour but de faire avouer à monseigneur Bilodeau les véritables circonstances de la mort violente de Vallier, pour laquelle Simon a été injustement condamné.


EXTRAIT

L’opéra Les Feluettes, créé en 2016, est l’adaptation lyrique de ma pièce du même titre écrite en 1986. […] On pourrait croire qu’il est simple de transposer une œuvre théâtrale à l’opéra, mais la réalité est tout autre. Chanter le texte intégral de la pièce originale aurait pris des heures et des heures, car chaque syllabe, chaque intention, chaque émotion fait naître la musique. Le temps opératique n’a pas la même valeur, on dirait que les secondes sont deux fois plus longues que la normale. […]
J’ai dû couper, charcuter, restructurer ma pièce pour laisser la musique parler à son tour. Reconstruire les phrases afin d’en exploiter la meilleure sonorité, la poésie, l’efficacité. Il a fallu créer des arias qui, semblables à des monologues intérieurs, offrent des moments d’intimité aux personnages et des morceaux de bravoure aux interprètes.
Le temps est étiré, répété, en boucle, en motifs, en rappels de mélodies. Tout le narratif de la représentation est déterminé : l’importance ou non de l’entrée ou de la sortie d’un personnage, l’utilisation des dissonances musicales pour montrer un état d’âme, le recours à tel instrument pour souligner l’ironie de la situation, à telle orchestration pour en appuyer la gravité.
Le lecteur de ces livrets doit imaginer qu’il y a parfois de multiples accords musicaux entre chacune des phrases, que les sentiments qu’il perçoit chez les personnages sont décuplés par l’orchestration.
C’est lors du visionnement des documentaires Illustre & Inconnu – Comment Jacques Jaujard a sauvé le Louvre, de Jean-Pierre Devillers et Pierre Pochart (2014), et L’espionne aux tableaux, Rose Valland face au pillage nazi, de Brigitte Chevet (2014), que m’est venue l’idée d’écrire La beauté du monde, mon premier livret qui ne soit pas basé sur une de mes pièces. À cette époque, j’étais encore sous le choc des outrages portés au temple de Palmyre, du saccage du musée de Bagdad, de la dévastation de la bibliothèque de Mossoul, de la destruction des mosquées d’Alep. Profondément marqué par les témoignages et les exploits de ces illustres inconnus que sont ces héros et héroïnes de la Deuxième Guerre mondiale ayant risqué leur vie pour sauver les trésors de l’humanité, j’y ai vu un message d’espoir. J’ai tout de suite ressenti le potentiel lyrique d’émotions plus grandes que nature émanant de ces récits et j’ai accepté une nouvelle invitation de l’Opéra de Montréal.
— La beauté du monde suivi de Les Feluettes, Michel Marc Bouchard

PRESSE

L’opéra de Julien Bilodeau et de Michel Marc Bouchard, La beauté du monde, a conquis le public et la critique. En temps de guerre, n’oublions jamais l’Ukraine, ce récit nous rappelle que le cri ultime de la poète Huguette Gaulin résonne encore plus fort dans nos oreilles au sujet du monde qui nous entoure et de notre droit d’y participer pleinement.

Marc Cloutier, En toutes lettres

Cet opéra de résistance dénonce les horreurs de la guerre et l’aveuglement barbare, en martelant en substance ceci aux spectateurs : sans l’art, à quoi bon vivre ? On en fredonne le chant d’épilogue bien après ses dernières notes.

Odile Tremblay, Le Devoir

« À quoi bon vivre si l’art disparaît ? » Michel Marc Bouchard signe, avec La Beauté du monde, un nouveau plaidoyer – puisqu’il s’agit d’un thème récurrent, d’une conviction qui imprègne son œuvre tout entière – mettant en lumière le caractère essentiel de l’art au cœur de l’expérience humaine. La fresque proposée ici aborde aussi les considérations connexes que sont la cupidité, les dérives du pouvoir, la notion d’esthétisme, la tyrannie du « bon goût », la consommation aveugle et autres formes d’iconoclasme. En résulte un opéra exceptionnellement engageant et prégnant.

Sophie Pouliot, JEU

Assister à la naissance d’un grand opéra québécois est un privilège, tant pour la critique que pour le public. D’autant plus avec une œuvre riche comme la beauté du monde de Julien Bilodeau et Michel-Marc Bouchard

Emmanuel Bernier, La Presse

En plus de ses qualités esthétiques, ce spectacle dépasse largement la sphère du divertissement et touche à l’essentiel : que serions-nous sans l’art et la beauté ?

Marc-Yvan Coulombe, lesartsze

Je suis de mon époque et si je me sers de cette matière-là, je dois raconter à mes contemporains quelque chose qui se passe maintenant. Nous ne détruisons pas les tableaux, mais nous détruisons jour après jour notre patrimoine, que ce soit le patrimoine bâti ou paysager. Nous parlons dans l’opéra de la destruction de la beauté et je peux dire que nous allons allègrement dans ce sens présentement.

Entrevue avec Emmanuel Bernier, La Presse

Les mots, les paroles, le texte dans son ensemble, possèdent justement cette idée du poids, de la mesure, alors que dans l’esprit de l’auteur, il semble primordial de renoncer à toute tentative de mélodramatiser le propos ; La beauté du monde, si l’on en juge par le résultat, est un moment de théâtre clinique, chirurgical. Malgré les apparences, c’est justement sa froideur, l’espacement qu’il prend avec les événements qui confirment sa supériorité, son authentique originalité.

Élie Castiel, KinoCulture Montréal


MICHEL MARC BOUCHARD

Dramaturge de réputation internationale, Michel Marc Bouchard est l’auteur notamment des Feluettes, des Muses orphelines et de Tom à la ferme, pièces ayant toutes fait l’objet de productions cinématographiques. Plus récemment, il a fait paraître EMBRASSE, qui a remporté un vif succès auprès de la critique et du public. Il a reçu en novembre 2021 le prix Athanase-David pour l’ensemble de son œuvre.

Photo : Olivier Clertant.

Livrets d’opéras / Collection « Théâtre Leméac » / Prix indicatif : 13,95 $

112 pages environ / 12,7 x 19,6 cm / 978-2-7609-0482-8

En librairie le 16 novembre 2022

Également disponible au format numérique - ePub