La jeune Éloïse a-t-elle vraiment jeté son père dans le puits, comme on nous le propose dès l’incipit? Maladivement maigre, elle a surtout, selon toute vraisemblance, été victime d’un traumatisme qu’elle ne laissera pas la définir. Depuis la maison recluse qu’elle partage avec sa mère et son grand-père alité jusqu’à cette petite ville industrielle où le terrain de son exploration se métamorphose, la jeune fille évolue dans un rapport complexe à ce corps changeant qui cherche à s’accorder, à se mettre au diapason du monde qui l’entoure, comme ce violon volé à son grand-père dont elle aimerait tant savoir jouer.

Dans la forêt, elle s’enroulait de mousse végétale, mettait des épines de pin desséchées dans ses cheveux pour leur donner une teinte rousse, se mirait seulement dans les ruisseaux et les flaques d’eau et de boue. Ici, elle voyait son reflet partout: dans les miroirs qui tapissaient les murs de l’auberge, dans les vitrines des magasins, dans les yeux des passants.

 PRÉSENTATION

Le roman précédent de l’auteure, Année ou Le livre d’Émilie, était directement inspiré de l’univers d’Emily Brontë. Manon Louisa Auger poursuit ici l’élaboration de son oeuvre, cette fois grâce à un roman campé pendant la Grande Crise économique, dans un univers nourri notamment par ses lectures d’Anne Hébert, toujours en affirmant indéniablement la singularité de sa propre voix.


EXTRAIT

Éloïse, au contraire de ses amis, était faite de profondeurs abyssales, de puits sans fond, de gouffres menaçants dans lesquels les bêtes de la forêt pouvaient s’engouffrer pour la dévorer de l’intérieur. Et, à force de tomber, elle risquait de disparaître sans que personne s’en aperçoive, pas même ces deux-là qui marchaient devant elle, insouciants ; crier ne suffisait pas pour qu’on vous entende, pas plus dans les cités bruyantes que dans le silence des forêts boréales.
[...]
Seulement, Lo avait cette intuition que, en vérité, il ne lui arriverait rien, rien du tout, et que c’était précisément ce qui était tragique pour elle. Son horizon était difforme et imprécis, terriblement lointain, comme les montagnes qu’elle ne pouvait atteindre. Alors elle attendait ce quelque chose, égrenait ce rien en regardant la poussière.
— Éloïse ou le violon, Manon Louisa Auger

PRESSE

Éloge vibrant de l’imaginaire et critique virulente du patriarcat, Éloïse ou le violon s’avère un roman d’une sombre et sulfureuse beauté rappelant les plus cruels contes pour enfants.

— Manon Dumais, Le Devoir ★★★ 1/2

J’ai une vision un peu démodée de la littérature. C’est-à-dire que ma façon d’écrire n’en est pas une pour réparer des choses, ce n’est pas une façon d’exorciser ou de régler des comptes. C’est vraiment une façon d’explorer la laideur du monde, la violence, mais en l’esthétisant beaucoup afin de confronter mon lecteur avec des sentiments contradictoires.

— Entrevue, Les Libraires

C’est une histoire terrible qui nous est racontée dans Éloïse ou le violon, mais le tout est servi dans un écrin feutré qui rappelle les œuvres des sœurs Brontë. Manon Louisa Auger emprunte ici la plume à un siècle révolu pour la tremper dans l’encre de la sauvagerie qui taraude ses personnages délicieusement complexes, qui flirtent avec les archétypes des contes de fées – ceux qui font frémir plutôt que rêver.

— Josée-Anne Paradis, Les Libraires


MANON LOUISA AUGER

Manon Louisa Auger est originaire de la région de Portneuf et vit actuellement à Montréal, où elle partage son temps entre la création, la recherche et l’enseignement. Elle travaille déjà à un prochain livre, une biofiction qui portera sur des figures féminines méconnues de l’époque victorienne canadienne-française.

Photo : Audrée Wilhelmy.

Roman / Prix indicatif : 25,95 $

208 pages environ / 14 x 21,6 cm / 978-2-7609-4893-8

En librairie le 6 avril 2022

Également disponible au format numérique - ePub